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La proposition du liégeois Alexandre Neujean au Congrès international des électriciens
(Paris, 19 septembre 1881)

La question de la vision à distance par l'électricité n'a pas été officiellement à l'ordre du jour du Congrès international des électriciens qui se tient à Paris, dans le cadre de l'Exposition internationale de l'électricité, du 15 au 24 septembre 1881. Shelford Bidwell fera une présentation de son appareil de "photographie télégraphique" dans le cadre de réunion de la Société des ingénieurs télégraphistes et électriciens britanniques, qui se tient en marge du Congrès. A la mi-août, à la sortie de sa visite de l'exposition, Victor Hugo a évoqué l'hypothèse de la vision à distance. Plusieurs des intervenants du congrès ont déjà contribué aux recherches sur le sélénium (les frères Siemens, Mercadier) (Ayrton, Du Moncel, Hospitalier) ou contribueront (Brillouin, D'Arsonval) à la réflexion sur la vision à distance, mais le sujet n'est pas au programme.

D'après les documents officiels du Congrès, le seul qui a évoqué le sujet, très brièvement, est A. Neujean, ingénrieur-chimiste à Liège. Lors de la séance de la troisième section, qui se tient le 19 septembre et qui est consacrée à la transmission à distance des forces. Selon le procès-verbal "M. NEUJEAN; (Belgique) demande que l'on étudie la transmission électrique des images à distance par les miroirs vibrants".  

Alexandre Neujean (1838-1888) est ingénieur, chimiste et docteur en sciences naturelles. Sa notice nécrologique, parue dans le Bulletin des sociétés chimiques belges, nous indique qu'il était également entrepreneur et avait obtenu 25 brevets, dans des domaines très divers. L'électricité ne paraît pas avoir été son domaine principal, mais en 1881 il avait obtenu un brevet relatif à la galvanoplastie. Son entreprise, A. Neujean et E. Delaitte, qui avait été crée en 1875, était sise au 50 rue Hors-Château, une des rues bourgeoises de Liège, était statutairement définie comme "maison de commerce et de commission pour les produits chimiques, couleurs, engrais, produits alimentaires, etc". (1)

Neujean disposait d'une certaine notoriété en France. Un de ses articles sur le cuivre et le fer avait été publié en 1870 dans le Bulletin de la Société chimique de Paris.(2) et son procédé de galvanoplastie conçu pour protéger les grosses pièces de fonte était utilisé par l'administration communale liégeoise mais aussi par la Ville de Paris.(3). Son système d'épuration des eaux d'égoûts, utilisé par la Ville de Liège, a également été cité dans La Nature.(4) Son décès est signalé dans les Mémoires de la Société des ingénieurs de France, dont il était membre depuis 1883 (5).

Nous ignorons si la proposition de Neujean relative aux miroirs vibrants était le résultat de ses propres réflexions ou si elle lui avait été soufflée par un autre participant, comme cela arrive parfois dans ce type d'événement. Toujours est-il qu'elle était inédite pour l'époque et qu'elle était probablement inspirée par les travaux de Jules Antoine Lissajous sur l’étude optique des mouvements vibratoires (1857).. En 1882, le britannique Atkinson proposera de recourir aux tambours de miroirs, hypothèse qui sera théorisée en 1889 par Lazare Weiller. Le recours aux miroirs vibrants sera tenté en 1898 par Jan Szczepanik dans la mise au point avortée de son telelectroscope. .

Il faudra attendre le Congrès international des électriciens dans le cadre de l'Exposition universelle de Paris en 1900 pour qu'un exposé - celui de Constantin Perskyi - soit consacré à la télévision. 

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Le Palais de l'Industrie, sur les Champs Elysées, où s'est tenue en 1881 l'Exposition internationale d'Electricité.

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(1) Annexe au Moniteur belge du 30 septembre 1875, p. 651.

 

(2) Alexandre NEUJEAN, "Nouvelle méthode de dosage du fer et du cuivre dans les plombs du commerce", Bulletin de la Société chimique de Paris. 1870. pp.429-431, 

 

(3) "Les progrès de l'électro-chimie. Dépôts de métaux sur la fonte et le fer", La Nature, 22 juillet 1882, p.118

(4) "Utilisation des eaux d'égoûts à Liège", La Nature, 9 septembre 1892 p.226. Egalement cité in Gas journal; light, heat, power, bye-products ... v. 40, 10 October 1882.

(5) Mémoires de la Société des ingénieurs de France, 1889, p. 5 et 46

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Notice nécrologique d'Alexandre Neujean, Bulletin de l'Association belge des chimistes, 1889, p.181

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Publicité pour la Maison A. Neujean et E. Delaite, in Agenda du chimiste à l'usage des ingénieurs, physiciens, chimistes, fabricants de produits chimiques, distillateurs, agriculteurs, fabricants de sucre, teinturiers, photographes, & c., Hachette, Paris, 1884.

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La rue Hors-Château à Liège au début du XXe siècle. La Maison Neujean et Delaitte devait occuper l'immeuble à façade blanche, à droite de la photo, en face du Temple antoiniste. L'immeuble n'existe plus. 

André Lange, 4 juin  2O23

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Sur cette photo, la Maison Neujean et Delaitte devait occuper l'imeuble à gauche, derrière la fontaine Saint-Jean Baptiste. On aperçoit des produits exposés en vitrine.

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