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En 1898, le major autrichien Benedict Schöffler conçoit un système de photo-télégraphie à base de doubles roues à miroir. Il imagine que cela pourrait devenir un système de télévision.

 

Cette proposition est contenue dans une brochure peu connue et peu commentée. Major Benedict SCHÖFFLER,  Die Phototelegraphie und das Elektrische Fernsehen, Wilhelm Braumüller, Wien und Leipzig, 1898.

Benedict Schöffler - Une carrière militaire

On ne sait pas grand chose du Major  Benedict Schöffler Je ne puis que tenter d'en esquisser la biographie à partir des publications officielles, accessibles sur Internet, rendant compte de son statut et de ses activités dans l'armée impériale et royale autrichienne.

Selon Das K. und K. Corps-Artillerie-Regiment Luitpold chronik der Ereignisse vom Jahre 1854 bis 1894. il est né à Prague en 1849 et est entré en service en 1867.

 

Le 10 février 1887, à Krakau (Styrie), il présente un rapport sur la navigation aérienne et de la promotion militaire de celle-ci". "Uber die Lufschiftfahrt und der militârschen Werb derselben".. (Organ der Militärwissenschaftlichen Vereine, 1887, p.9)

 

Après diverses promitions, il devient capitaine de deuxième classe le 18 août 1888. Le 1er juin 1884, il est promu Commandant de la batterie n°3 dans le Corps-Artillerie-Regiments Luitpold Prinz-Regent von Bayern Nr. 10. 

 

Une publication impériale du 20 avril 1895 nous apprend qu'il servait dans le Corps-Artillerie-Regiments Luitpold Prinz-Regent von Bayern Nr. 10 et qu'il a reçu une croix de service militaire (Militär Verdienstkreuz, 1ere classe.

Une publication militaire de 1896 nous apprend que pour pallier à l'absence de munition permettant des tirs à l'entrainement, le Capitaine Schöffler; a  construit un appareil de jeu de tir qui est destiné à permettre de pratiquer le tir d'artillerie dans les écoles d'hiver, c'est-à-dire à l'intérieur, et qui, lorsqu'il est utilisé pour résoudre des tâches sur le plan du jeu de guerre, est destiné à constituer un complément au jeu de guerre.

Sa publication principale, Lösung von Aufgaben des Richtbogens und des Sprenghöhenmessers (1897), qui sera rééditée à deux reprises, porte sur l'arc électrique et un mesureur de hauteur de souffle qu'il a conçu. 

Nous ne savons pas quand Schöffler a commencé à s'intéresser aux problèmes de télégraphie et de photo-télégraphie. Il indique dans sa brochure que des passages ont été écrits dès 1895. The Electrician, 29 janvier 1896 nous apprend qu'il a introduit au Patent Office britannique, en collaboration avec C.R. von Blumencron une demande de brevet "Improvement in electric telegraphy" (n° 29.227). Contrairement à ce qui est affirmé dans la brochure de 1898, ce brevet ne sera pas accordé. (Lettre de M. Melvyn Rees, Classification & Documentation Section, Patent Office, 12 janvier 2000).

Le 1er février 1896, il est muté aux Cours Techniques Militaires, (Technischen Militär-Fachcursen) où il est nommé enseignant en 1897 (A. 5e E. du 28 septembre 1897 – Praes. n° 5298, du 29 septembre 1897)

Une brochure de revendication d'antériorité
 

Lorsqu'il publie la brochure Die Phototelegraphie und das Elektrische Fernsehen en 1898, Schöffler a 49 ans, a déjà plusieurs publications a son actif et jouit vraissemblablement de l'estime de sa hiérarchie.


Comme Schöffler l'explique dans son introduction, il publie cette brochure dans le contexte de la publication de la brochure de Maximilian Plessner, Die Zukunft des elektrische Fersehens (1892) et de l'assez large publicité faite à la démonstration "devant un public choisi" du télectroscope de Jan Szczepanik. Schöffler revendique une antériorité de paternité, puisqu'il prétend avoir obtenu un brevet auprès du Patent Office britannique le 19 décembre 1896. Il cite même la référence de son brevet (n° 29.227). 

Description de l'appareil. 

Schöffler constate que les procédés de télégraphie à crayon (du type de celui de Caselli) ne sont pas vraiment opérationnel et se propose de concevoir un appareil permettant la transmission de photographie basé sur les propriétés photosensibles du sélénium. Il dit s'inspirer de la proposition d'une "télévision à miroir" découverte en 1884 par l'enseigne Wilhelm von Szigyarto et dont a rendu compte le Neues Wiener Tagblatt du 22 mars 1897. Malgré nos recherches nous ne sommes pas arriver à trouver trace de cet appareil et de son inventeur dans ce journal, ni dans aucun de la pourtant très riche et très opérationnelle hémérothèque numérique ANNO de la Bibliothèque nationale autrichienne.

Nous empruntons à la Monatshefte für Politik und Wehrmacht un résumé de la description de l'appareil.

L'appareil est composé de deux stations A et B munies chacune d'un miroir Le miroir à A est conçu pour recevoir les rayons lumineux de l'objet à voir à distance, et une source lumineuse, telle qu'une lampe électrique, est placée en face du miroir en B.  Cependant, cette source lumineuse est entourée d'un écran mobile qui, selon sa position, laisse toujours tomber une petite partie des rayons lumineux émis par la source lumineuse sur le miroir opposé par une petite ouverture. Le miroir A et le diaphragme B sont maintenant reliés par un circuit électrique, dans lequel une cellule au sélénium est connectée, de telle manière que chaque rayon de lumière tombant d'un objet quelconque dans le miroir A frappe la cellule au sélénium connectée dans le circuit et, selon sa intensité lumineuse, laisse passer un courant plus ou moins fort dans la ligne. Grâce à ce courant, un électro-aimant est alternativement renforcé et affaibli à la station B, attirant ainsi une armature reliée à l'écran et donc l'écran lui-même parfois plus, parfois moins, et les différentes positions de l'écran font que par la petite ouverture du même de la source lumineuse seule la partie tombe contre le miroir en B qui correspond à l'intensité d'éclairement de la cellule au sélénium de la station A.

 

Les rayons de lumière reçus par le miroir B à travers l'ouverture du diaphragme sont projetés sur un écran opposé, et là, avec une succession rapide des rayons de lumière individuels, produisent une image de l'objet en A. Les miroirs en A et B sont également reliés par des fils électriques, qui les mettent en vibrations régulières et simultanées (synchrones), de sorte que tous les points de l'objet sont réfléchis successivement par le miroir A contre la cellule au sélénium, et aussi par le miroir B simultanément être attrapé. C'est le cas de la télévision avec miroir découverte en 1884 par l'enseigne de navire Szigyarto 

Le principe de la phototélégraphie du major Schöffler consiste dans le fait que l'image prise sur l'écran du poste B avec le téléviseur ("Fernseher") ci-dessus est prise sur papier au lieu d'être sur un écran et est sensible à la lumière. Le major Schöftler donne une description détaillée d'un appareil au moyen duquel il veut réaliser « des dépêches écrites dans toutes les langues et dans toutes les écritures, des coupures de journaux imprimées, etc., qui sont placées dans une camera obscura au poste de transmission, et envoyées en quelques secondes dans une station d'enregistrement à distance. »

Schöffler avait d'abord l'intention d'utiliser son appareil pour la transmission télégraphique des dépêches manuscrites, ce qui pourrait simplifier la solution du problème dans la mesure où il n'avait qu'à transmettre le lettrage noir de la dépêche sans être obligé de reproduire des teintes. Il  envisageait cependant une extension possible vers la télévision.

 

L'appareil nécessite sur un double jeu de larges roues à miroirs avec balayage par cellules de sélénium.

Le major Schöffler ne manque pas de reconnaître les difficultés qui s'opposent à la mise en place de l'appareil qu'il propose. Il discute des exigences qui doivent être faites à l'art photographique, aux concepteurs de machines et aux ingénieurs électriciens afin de pouvoir réaliser son appareil, mais arrive à la conclusion. que lui-même que le problème peut être résolu et que son appareil pourrait être opérationnel, par exemple entre Vienne et Paris, ligne sur laquelle il suppose quotidiennement environ 7 200 dépêches dans chaque direction comme correspondant aux besoins actuels du trafic, ce qui serait probablement rentable.


Enfin, l'auteur mentionne que si l'on utilise des plaques de verre dépoli au lieu de papier photosensible à la station de réception et que l'on fait fonctionner sa machine en série de manière à ce que l'ensemble du télégramme soit terminé en 1/4 de seconde au plus - l'impression de lumière sur la rétine de l'œil humain disparaît après environ 1/2 seconde - que l'on peut alors voir la dépêche pendant un instant comme une image rougeoyante sur la plaque de verre dépoli, ce qui résoudrait le problème de la "télévision électrique".

 

Nous ne sommes pas en mesure de décider si les propositions du major Schöffler seront réalisables dans le détail, si par ex. Par exemple, la technologie réussira à mettre en place des machines qui fonctionnent de manière assez homogène et synchrone sur deux stations distantes. En tout cas, le point sensible de l'ensemble du projet nous semble être celui que l'auteur lui-même mentionne au début de sa brochure (p. 4) : « Les ingénieurs électriciens dans le domaine doutent que la différence même entre le noir éclairé et les surfaces de papier blanc affectent les cellules de sélénium peuvent en quelque sorte produire un effet notable. " Tout le plan tient ou tombe avec les propriétés électriques du sélénium. Dans tous les cas, le major Schöffler a le mérite d'avoir travaillé avec soin sur un problème difficile et de l'avoir décrit clairement, et si son travail de suggestions peut être réalisé, le résultat devrait être une révolution complète dans le domaine des services télégraphiques et postaux.

Réception de la brochure

   

Je n'ai pu repérer que huit recensions d'époque de la brochure de Schöffler :

 

  • Un article intitulé "The Phototelegraph" est paru en juin 1898 dans The Boston Transcript et a été repris le 12 juin 1898 dans The Atlanta Constitution (ci-joint)

  • La brochure fait l'objet d'un article dans The Taranaki Herald (New Plymoutrh, Nouvelle Zélande)) le 15 juillet 1898, dans le contexte de l'enthousiasme pour le teleltroskop de Jan Szczepanik. 

  • Celle qui en est faite par Constantin Perskyi dans sa communication au Congrès international d'électricité, le 24 août 1900. Il est intéressant de noter que Perskyi et Schöffler étaient tous deux officiers et enseignants dans les écoles d'artillerie. Cette dimension militaire n'est évidemment pas un hasard : la recherche dans le domaine des télécommunications avait déjà à l'époque des implications stratégiques évidentes.

  • Dans leur Handbuch der Phototelegraphie und Teleautographie (1911), Arthur Korn et Bruno Glatzel consacrent cinq pages (pp.338-343) à la description de l'appareil de Schöffler et reproduisent certains des schémas. Les auteurs notent qu'à leur connaissance, l'appareil de Schöffler n'a jamais été mis en pratique.


La Bibliothèque de l'Université Louis Pasteur de l'Université de Strasbourg possède un exemplaire de cette brochure, portant un cachet de l'ancienne Université impériale de cette ville, ce qui laisse supposer qu'elle y est parvenue assez rapidement après sa parution. Peut-être cela s'explique-t-il par le fait que le Professeur Ferdinand Braun, inventeur du tube cathodique et qui partagera en 1909 le Prix Nobel de physique avec Marconi pour des travaux sur la téléphonie sans fil, était à l'époque enseignant à l'Université de Strasbourg.

Siegfried Zielinski est un des rares auteurs contemporains à citer l'appareil de téléphotographie de Schöffler dans son livre Audiovisions (Version anglaise, 1999). Mais il n'a pas vérifié si le Major autrichien avait vraiment eu son brevet britannique pour cet "appareil bizarre". 

André Lange, 6 mars 2000. Révisions 16 avril 2023, 28 avril 2023

Une des étonnantes figures de la brochure du Major Benedict Schöffler sur la télévision électrique. Voir l'ensemble des planches ci-dessous.. (Collection André Lange)

Publications du Major Schöffler

 

  • Atlas über das k. k. Österreichische Artillerie - Naterial. Zu- 1869. zusammengestellt v. B. Schöffler; u. A. Počta, Artillerie-Lieutenants. Lieferung 1-3, 1874.

  • Synthetische Theorie der Curven II. Ordnung. Für den Selbst-Unterricht bearbeitet von Benedict Sschöffler, Artillerie-Ober- lieutenant und Lehrer der darstellenden Geometrie an der k. k. Artillerie-Cadetenschule zu Wien. Wien 1882. Selbstverlag des Verfassers. 8. 1 fl. 

  • Das elektrische Gewehr, elektrische Minenzündung, elektrische Distanzmesser und das Gastroskop, Wien, 1884 ; 

  • Lösung von Aufgaben des Richtbogens und des Sprenghöhenmessers nebst Beschreibung dieses Instruments ... 1897; 2nd ed. 1900; 3rd ed. 1903.

    • "Résoudre des tâches à l'aide de l'arc électrique et du mesureur de hauteur de souffle ainsi qu'une description de cet instrument" ; avec 58 figurines et un modèle de l'explosif altimètre. Le but de la brochure est de "contribuer à une connaissance approfondie de la feuille de route et de montrer quelle variété de tâches peut être résolue très facilement avec cet instrument simple et avec l'altimètre explosif (construit par l'auteur)."​

  • Das Zeichnen perspektivischer Terrainskizzen mittels der Meßplatte mit 3 Terrainskizzen und einer Meßplatte aus Karton. 1900.

Major Benedict SCHÖFFLER,  Die Phototelegraphie und das Elektrische FernsehenWilhelm Braumüller, Wien und Leipzig, 1898.(coll. A. Lange)

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Exemple de photo-télégramme imaginé par Benedict Schöffler.

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